aurélien grèzes


CAPTURE D'ECRAN (VIDEO STILL)

Berlin . Times Square . Boston . Philadelphia . Paris . NYC

A propos de Standing

Dans les vidéos de la série Standing je filme la présence d'un individu dans la foule, et les changements qui apparaissent au fil du temps. Le dispositif est simple : à ma demande, quelqu'un se trouve à un endroit que j'ai repéré et y reste pendant toute la durée du tournage.
Je filme seul, avec une petite caméra, et le "sujet" filmé ne sait pas où je suis caché.
Je ne fais pas de casting, je filme celles et ceux qui le souhaitent. Les personnes viennent telles qu'elles sont, c'est ainsi que je veux les filmer, il n'y a pas de "personnage" à jouer. Je ne donne aucune instruction particulière, si ce n'est d'être et de rester à l'endroit indiqué, sans regarder sa montre ou son téléphone portable. C'est cette perception du temps, et l'absence d'indication temporelle, que je veux filmer.

 

Je m'intéresse à la manière dont chacun des sujets filmés est simplement "à un certain endroit à un certain moment". D'une personne à l'autre les nuances sont minimes, ce qui pousse le spectateur à regarder les détails. J'utilise la caméra comme une loupe, pour révéler des micro évènements et des gestes qui, dans la précipitation de la vie quotidienne, passent inaperçus. Je veux souligner le mouvement des corps et des regards, la façon dont chaque personne occupe l'espace et le temps.
Je suis intrigué par la signification des regards. Me cherchent-ils ? Font-ils semblant d'attendre quelqu'un d'autre ? Ou attendent-ils simplement que je leur signale la fin du tournage ? Parfois la situation est inconfortable pour eux, parfois elle ne l'est pas.
Les personnes, se sachant filmées, imaginent (souvent à tort) que les gens qui passent à côté remarquent le tournage. Traversant le cadre en passant devant la caméra, ces "figurants" ne sont pourtant pas tenus informés du tournage. Les interactions avec les "performeurs", qui eux sont là "pour" la caméra, surviennent à travers un regard ou un simple coup d'oeil, comme des rencontres éphèmeres entre la réalité et la "fiction".

 

STANDING in Times Square, NY (2020), extrait (extract)

 

En repérage, je cherche des lieux où les participants seront entourés de la foule tout en étant légèrement détachés d'elle. La foule aide les participants à oublier la caméra, puisqu'ils sont distraits par les gens qui passent autour. Puisque je filme en étant caché la caméra est comme "invisible", ce qui permet au sujet filmé de l'oublier.

J'essaie de "saisir" des moments où les personnes sont perdues dans leurs pensées. Après un moment, soudain et éphèmere, de "réveil", comme un retour à la réalité, elles se "reconnectent" avec l'espace dans lequel elles se trouvent . J'aime ces aller retour entre le monde intérieur, invisible, et le monde extérieur, visible.


CAPTURE D'ECRAN


Mon intention est de saisir la tension entre la conscience que le sujet a d'être filmé et le fait (l'illusion ?) de "s'oublier", de disparaître dans ses pensées. Comment les spectateurs peuvent-ils réagir face à cette ambiguité et quel impact cette tension a-t-elle sur leur présence même devant l'écran ?

En tant que spectateurs de la vidéo nous regardons des personnes qui regardent des personnes. Des deux côtés de l'écran, la durée a différents effets : attraction, lassitude, nervosité, immobilité, etc.
Parfois le regard du sujet est comme pénétré et absorbé par notre regard de spectateur. Autrement, lorsque la situation devient inconfortable, le regard du sujet tend à se "fermer", il évite le regard des passants, "rejetant" par la même celui du spectateur.
J'imagine le regard du sujet comme une surface réflexive, un miroir de la présence du spectateur face à l'écran. Comme un dialogue entre le "regardeur" et le "regardé".



Projection de STANDING / Screening at the Queens museum NY (2015)